Le Salon du dessin s’étend au XXe

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 12 mars 2014 - 905 mots

Confrontée à la stagnation du nombre de collectionneurs de feuilles anciennes,
la 24e édition du Salon du dessin, à la Bourse, s’ouvre plus largement à la création d’aujourd’hui.

Créé en 1991 à l’initiative de neuf marchands pour promouvoir le dessin de collection, ce salon spécialisé de référence pour les dessins du XVIe au XXIe siècle s’est forgé une belle réputation. Ses organisateurs ont su l’enrichir d’événements, tels que la « Semaine du dessin », mise en place en 2000 en lien avec les musées parisiens. Louis de Bayser, nommé à la présidence le 20 novembre 2013, succédant à Hervé Aaron, président durant seize ans, attend de cette 24e édition « qu’elle se déroule tout aussi sereinement que les années passées ».

Au total, 39 exposants (22 français, 17 étrangers) se répartiront les stands du palais de la Bourse, et malgré des absents comme Bob Haboldt (Paris) – « en raison de dates trop rapprochées avec Tefaf [la Foire de Maastricht] », trois nouveaux ont été conviés. Ainsi de Nathalie Motte-Masselink (Paris), selon laquelle « cette première participation à ce salon, à l’ambiance intime et atypique, va très fortement augmenter la réputation de [s]a jeune galerie, ouverte en 2010 ! ». Elle expose des dessins anciens issus de toutes les écoles européennes, « une diversité qui nous permet de rencontrer des amateurs pour chacune de ces écoles et d’étendre très largement nos contacts », confie-t-elle.
Comme en 2011, l’enquête réalisée l’an passé auprès des visiteurs a montré que 44 % d’entre eux ont fait le déplacement pour les dessins modernes, contre 38 % pour les dessins anciens, alors qu’en 2012, la répartition était inversée. Quelle sera la tendance pour 2014 ? Du côté de l’offre, il existe un juste équilibre entre ces deux spécialités.

Le contemporain s’immisce
Parmi les dessins anciens, l’intérêt se porte sur une Tête de moine portant capuchon, représentée de trois quarts par Fra Bartolomeo (1472-1517), exposée chez Jean-Luc Baroni (Londres). Un temps attribuée à Raphaël, cette œuvre est restée dans la même collection pendant deux siècles. Jean-Luc Baroni avait fait sensation en 2013 avec un dessin de John Martin, La Destruction de l’armée du pharaon (1836), vendu dès le soir du vernissage pour 1,5 million d’euros environ. « Si cette feuille n’a pas le même impact, elle est bien plus significative au regard de la rareté des dessins de la Renaissance », souligne-t-il. Louis de Bayser (Paris) propose, outre un pastel de Benedetto Luti, Portrait de jeune fille (v. 1700), un fusain atypique de Rodin : « un grand dessin, très noir, avec une matière bien grasse. Il est assez puissant, avec un côté sculptural, tridimensionnel ». Didier Aaron & Cie (Paris) montre une grande feuille de Paul Delaroche (1797-1856), dessin préparatoire à l’une des figures de l’hémicycle de l’École des beaux-arts de Paris, tandis que la galerie zurichoise Arturo Cuéllar expose une aquarelle de Théodore Géricault, La Charrette à charbon (recto), Étude d’un cheval (verso), exécutée à la pierre noire vers 1820 lors d’un voyage à Londres. Provenant de la collection Jan Krugier, cette œuvre a été adjugée 245 000 dollars (179 000 euros) chez Christie’s New York en novembre 2013.

La section des dessins modernes est également bien fournie. Selon Louis de Bayser, « il y a toujours eu des dessins modernes au salon, mais depuis cinq ou six ans, les dessins contemporains sont plus présents. C’est une évolution bonne pour le dessin ancien ». Deux galeries seulement sont spécialisées en art contemporain, Karsten Greve et la Galerie de France (Paris). Mais parmi les exposants qui proposent d’ordinaire des maîtres modernes, plusieurs présentent des œuvres contemporaines, à l’instar de la Galerie AB (Paris) ou de Ditesheim & Maffei Fine Art (Neufchâtel), qui, à côté d’un dessin d’Alberto Giacometti, expose une œuvre d’Erik Desmazières (né en 1948). Également, la Galerie des Modernes (Paris) propose tant des dessins d’Andy Warhol que des feuilles cubistes d’Albert Gleizes et d’autres de Foujita, dont Jeune femme en buste, à la mine de plomb (succession Kimiyo Foujita).
Jacques de la Béraudière (Paris) présente une gouache recto verso de Wifredo Lam, Untitled (1942), véritable explosion de couleurs, cédée 651 000 euros chez Christie’s Londres en février 2013. La Galerie de la Présidence (Paris) reste fidèle à ses artistes de prédilection puisqu’elle met en avant Coup de vent (1928), une aquarelle de Marcel Gromaire, ainsi qu’une aquarelle de Jean Hélion, Composition (1934), jamais présentée sur le marché. Applicat-Prazan (Paris) propose, de Nicolas de Staël, Composition en vert, bleu, ocre et noir (v. 1944), un pastel qui a été exposé à la rétrospective de l’artiste organisée au Centre Pompidou en 2003. Antoine Laurentin (Paris) offre un collage de Maurice Estève de 1968, Dame noire au strelitzia.

Eu égard aux prix pratiqués : « Les marchands savent que c’est l’occasion de rencontrer un conservateur et proposent des œuvres autour de 300 000 à 400 000 euros, précise Louis de Bayser. La moyenne se situe aux alentours de 10 000 à 50 000 euros, mais en parallèle, chacun expose des feuilles de moindre envergure. Sur mon stand, des dessins pourront se négocier 3 000 à 5 000 euros. » Échelonner les prix devrait permettre d’augmenter le nombre d’acheteurs car l’enquête réalisée en 2013 a révélé que 81 % des visiteurs n’avaient pas acquis de dessin. Contrairement à la peinture, « il n’y a pas un grand renouvellement des collectionneurs depuis vingt-cinq ans », constate Nicolas Joly, expert en tableaux et dessins anciens.

Salon du dessin

Du mercredi 26 au lundi 31 mars, Palais Brongniart, place de la Bourse, 75002 Paris, 12h-20h30
jusqu’à 22h le jeudi 27, jusqu’à 20h le lundi 31
www.salondudessin.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°409 du 14 mars 2014, avec le titre suivant : Le Salon du dessin s’étend au XXe

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