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Fusion-acquisition

La fin annoncée de la Corcoran

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 26 février 2014 - 554 mots

WASHINGTON / ETATS-UNIS

La National Gallery of Art de Washington et la George Washington University vont se partager le musée et l’école d’art de la Corcoran, en difficultés financières depuis plusieurs années

Washington (d.c.) - La nouvelle a été officialisée le mercredi 19 février : la Corcoran Gallery of Art and College of Art  Design s’offre à la National Gallery of Art de Washington (NGA) et l’université George Washington (GW). Entité double regroupant un musée fondé en 1869 par William Wilson Corcoran (1798-1888) et une école d’art et de design créée en 1890, la Corcoran traverse depuis plusieurs années une crise financière sans précédent. Parmi les solutions envisagées, un partenariat avec l’Université de Maryland faisait encore l’objet de discussion début février – son directeur attendait une réponse écrite de la Corcoran lorsqu’il a appris la nouvelle de la fusion ! Les administrateurs se réjouissent de l’accord obtenu avec les deux mastodontes de la culture et de l’enseignement de la capitale américaine, solution qui garantit l’inaliénabilité des œuvres et la remise en état du bâtiment de style beaux-arts, signé Ernest Flagg et datant de 1897.

Selon les termes de l’accord préliminaire, l’université George Washington accueille sous sa coupe l’école d’art et de design qui, à défaut de son autonomie, garde son identité propre. En intégrant l’école en son sein, la GW entend gagner en prestige et accéder à un nouveau réseau de mécènes. Par ailleurs, elle devient propriétaire des différents bâtiments de la Corcoran, parmi lesquels l’édifice historique qu’elle est chargée de remettre en état – un chantier que les administrateurs chiffrent à plus d’une centaine de millions de dollars. Or, l’intention de GW n’est pas de rénover le musée dans son intégralité, mais de partager l’espace entre espaces d’expositions et nouvelles salles de classe…

Une opportunité pour la National Gallery
Pour la National Gallery of Art, l’opération est une aubaine sans précédent. Non contente de profiter de l’édifice historique rebaptisé Corcoran Contemporary pour y organiser des expositions d’art moderne et contemporain dès cet automne, la NGA pourra se servir comme bon lui semble dans les collections de la Corcoran – soit environ 17 000 œuvres dont 2 000 tableaux. De quoi combler ses lacunes en sculpture américaine, mais aussi étoffer ses prestigieux fonds de peintures européennes et américaines avec un splendide Cours de danse (1873) signé Degas ou le Ground swell (1939) d’Edward Hopper, vu à la rétrospective parisienne de 2012. Les œuvres délaissées par la NGA devraient être distribuées dans les musées de la ville, voire de la région. C’est là où le bât blesse. Si elle échappe à une dispersion aux enchères, la collection constituée par William Wilson Corcoran s’est constituée  au fil des années grâce à la générosité de mécènes (Clark, Walker) qui ont fait don d’ensembles de peintures, de sculptures et d’arts décoratifs européens, d’antiquités, d’art africain-américain et de photographies – dont la collection Gordon Parks. Le Salon Doré, ancien décor de l’hôtel de Clermont à Paris datant de 1770, aura-t-il le même charme perdu dans l’immensité de la National Gallery ? Avec cette solution de survie, la collection du Corcoran s’apprête à perdre sa cohérence voulue par son fondateur et son intégrité historique. Ce, en dépit du projet de salle retraçant l’histoire de l’institution avec quelques œuvres emblématiques, que la Corcoran a exigées. L’organisation à but non lucratif Corcoran subsiste, à titre consultatif, pour sauver les apparences. Les trois parties ont jusqu’au 7 avril pour finaliser les termes du contrat.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°408 du 28 février 2014, avec le titre suivant : La fin annoncée de la Corcoran

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