Bande dessinée

BD

Deux revues post soixante-huitardes

Par Éléonore Thery · Le Journal des Arts

Le 25 février 2014 - 507 mots

L’histoire parallèle des bandes dessinées mythiques « Métal hurlant » et « À suivre » racontée au Fonds Hélène et Édouard Leclerc à Landerneau.

Landerneau - Deux revues qui ont révolutionné la bande dessinée (BD), un couvent des Capucins du XVIIe siècle et le roi des hypermarchés : c’est le cocktail explosif de l’exposition présentée à Landerneau (Finistère) au Fonds Hélène et Édouard Leclerc. Voilà maintenant deux ans que le directeur de l’enseigne des centres E. Leclerc a investi la grande halle des Capucins de son berceau familial pour y programmer des expositions d’art moderne et contemporain. Cet hiver, Michel-Édouard Leclerc, grand amateur du 9e art et longtemps sponsor du festival d’Angoulême, propose un parallèle entre deux revues mythiques de BD, Métal Hurlant et (À suivre). 350 planches originales et quantité de témoignages font de l’exposition le récit d’une aventure graphique et littéraire, mais aussi humaine. Créées dans le sillage post soixante-huitard, les revues établissent une rupture franche avec les codes du genre, centrés alors sur la ligne claire franco-belge. La jeune génération d’auteurs veut faire souffler un vent nouveau sur la BD.

Une liberté revendiquée
Ce sont Claire Bretecher, Nikita Mandryka et Marcel Gotlib qui ouvrent la voie en claquant la porte de Pilote dirigé par Goscinny pour fonder l’Écho des Savanes, où ils pourront s’exprimer librement.
Métal Hurlant, créé en 1975, s’inscrit dans le mouvement. Autour du rédacteur en chef Jean-Pierre Dionnet, deux artistes majeurs sont aux commandes : Philippe Druillet, inventeur d’un nouveau cadre de la planche et Jean Giraud (dit Moebius), virtuose du dessin. Avec pour maîtres mots liberté et exploration graphique, la revue indépendante est centrée sur la science-fiction et le fantastique, peu considérés à l’époque. « La revue n’avait qu’un seul principe : n’avoir aucune règle », explique Jean-Baptiste Barbier, commissaire de l’exposition. Métal Hurlant accueille les plus grands dessinateurs de l’époque et l’exposition est l’occasion d’admirer de près les monumentales planches foisonnant de détails de Philippe Druillet ou celles, non moins spectaculaires, de Paul Gillon pour Les Naufragés du Temps, sans oublier Jean Giraud, Enki Bilal ou François Schuiten.

La création de (À suivre) répond à de tout autres enjeux. Casterman perd du terrain et souhaite toucher la nouvelle génération. Face au succès de Métal Hurlant, la maison d’édition se décide à lancer sa propre revue en 1978, sous la houlette de Jean-Paul Mougin. Deux partis pris sont affirmés : le noir et blanc, en grande partie pour des raisons économiques, et le récit. Naissent alors des œuvres mythiques dont de fort belles planches sont exposées : celles d’Hugo Pratt dont l’anti-héros Corto Maltese explose grâce à la revue, le superbe travail d’ombre et lumière de Didier Comès ou la ligne de Jacques Tardi. Citons encore l’Argentin José Muñoz et Jacques de Loustal, le premier ayant introduit dans ses albums un fort contenu politique et le second la couleur. L’exposition aurait pu présenter deux frères ennemis, elle choisit plutôt de mettre en avant l’histoire d’une émulation, autour d’une dynamique commune : celle d’un bouillonnement créatif permanent avec la volonté de faire entrer la BD dans le monde des adultes. Un pari gagné.

1975-1997 : La Bande Dessinée fait sa révolution. Métal Hurlant, (À suivre)


Jusqu’au 11 mai, Fonds Hélène et Édouard Leclerc pour la culture, Aux Capucins, 29800 Landerneau, tlj 10h-18h, 02 29 62 47 78, www.fonds-culturel-leclerc.fr/

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°408 du 28 février 2014, avec le titre suivant : Deux revues post soixante-huitardes

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