Monochrome

Peinture spatiale

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 12 février 2014 - 485 mots

Grâce à des collaborations avec d’autres artistes, Olivier Mosset déploie son travail dans l’espace du Centre culturel suisse.

PARIS - Plus le temps passe et plus Olivier Mosset semble s’installer dans les habits d’une figure tutélaire, pour ne pas dire d’un gourou, dont l’influence sur une jeune génération d’artistes ne faiblit pas ; une posture que, sur la scène helvète, il partage avec John M. Armleder.

Invité à intervenir dans les espaces du Centre culturel suisse, à Paris, Mosset a donc sollicité certains de ces jeunes artistes – à l’exception de Bertrand Lavier, de la même génération que lui – afin de ne présenter que des œuvres exécutées en « Collaborations », ainsi que l’indique un titre aussi sobre que ses toiles monochromes.

L’exercice est attrayant : parmi les sept travaux bicéphales exposés ici, certains sont le fruit d’une réflexion avec quelques créateurs agissant dans d’autres disciplines que les arts visuels, ce qui ne manque pas d’ouvrir le champ de réflexion et celui des possibles. Ainsi de ce travail réalisé avec la chorégraphe Marie-Agnès Gillot, soit des portes de bois accrochées très en hauteur dans l’espace d’accueil. La peinture y déborde de la surface pour aller se glisser sur le chant, laissant voir au passage des traces de coulures, un fini bien moins net que celui auquel le maître a accoutumé son public.

Le fini est en revanche impeccable sur cette Chevrolet de 1965 stationnée dans la cour, customisée avec l’aide de Jeffrey Schad et Vincent Szarek. On retrouve là les obsessions d’un « biker » invétéré venant bichonner son véhicule, ici avec une peinture d’un blanc nacrée et un toit recouvert d’un coloris parme au motif de fine dentelle. Le résultat n’est toutefois pas des plus heureux, qui flirte avec un kitsch pas assez tape-à-l’œil pour véritablement assumer son mauvais goût.

À l’étage les choses deviennent plus sérieuses, avec un espace central où, en seulement trois interventions, Mosset est parvenu à accélérer la réflexion sur le monochrome, qui depuis toujours l’habite. À droite, la reproduction de l’espace qui, dans la rétrospective de Bertrand Lavier au Centre Pompidou en 2013-2013, abritait ses « Walt Disney Productions » : un espace vidé de ses sculptures, aux cloisons jaune ou verte, et fermé par une paroi constituée de six vitres. À gauche, exécuté en collaboration avec Jacob Kassay, un mur miroir en six morceaux – sans doute pas le fruit du hasard – devant lequel court une rampe de salle de danse. Au centre, une sorte de caisson rouge et bleu de Donald Judd, en fait une sculpture rejetée par l’artiste américain que Mosset et Mai-Thu Perret se sont appropriés. Selon les points de vue et grâce aux jeux de miroirs et de reflets, s’anime alors une installation monochrome, comme un jeu de tableaux se mouvant au fil des déplacements, qui aspire le corps tout entier. C’est à cette précision que l’on reconnaît l’œil d’un grand artiste.

OLIVIER MOSSET, COLLABORATIONS

Jusqu’au 30 mars, Centre culturel suisse, 32-38, rue des Francs-Bourgeois, 75003 Paris, tél. 01 42 71 44 50, www.ccsparis.com, tlj sauf lundi 10h-19h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°407 du 14 février 2014, avec le titre suivant : Peinture spatiale

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