Paris

Bataille de chiffres aux Archives

Le Journal des Arts

Le 15 octobre 2013 - 707 mots

Un rapport sur la future refonte du site parisien, en partie inoccupé depuis l’ouverture de Pierrefitte, ravive les inquiétudes sur le devenir des bâtiments historiques de l’institution.

Paris - Après l’ouverture le 21 janvier de la nouvelle antenne des Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) [lire le JdA no 384, 1er février 2013], l’avenir du site historique des Archives à Paris revient sur le devant de la scène.

Début octobre, Agnès Magnien, directrice des Archives nationales, et Bernard Notari, inspecteur général des affaires culturelles, ont rendu un rapport sur les besoins en développement et la répartition des espaces sur le site parisien, où une dizaine d’hôtels particuliers s’imbriquent autour de 3 hectares de jardins dans le quadrilatère Rohan-Soubise. Entre le départ d’une moitié des archives pour Pierrefitte et l’abandon du projet de « Maison de l’histoire de France », l’incertitude régnait sur le devenir du site, vidé d’une partie de ses personnels (170 agents y travaillent actuellement, contre 400 en 2012, en raison des transferts sur Pierrefitte). D’autant plus que le site historique du Marais, ensemble hétérogène comprenant sous-sols, galeries souterraines, parcs et jardins, a pris « un retard indéniable en matière de fonctionnalité et de mises aux normes [. Celui-ci s’]explique [par] la faiblesse particulière, sur une longue période, du budget annuel d’entretien (400 000 euros par an en moyenne y compris [pour les] jardins[,] installations et […] réseaux techniques) », souligne le rapport de Mme Magnien et M. Notari.

Études de réimplantation
C’est dire si les travaux pressent. Beaucoup craignent un « effet BNF », qui a vu le site historique de Richelieu accuser un retard considérable entre l’ouverture du site François-Mitterrand et le début des travaux en 2009.

Le rapport Magnien-Notari était donc attendu au tournant. Durant l’été, l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (Oppic) a paru anticiper sur la remise du rapport en demandant deux études sur la réimplantation dans le quadrilatère Rohan-Soubise de l’Institut national du patrimoine et de la direction générale de la Création artistique. Le syndicat des Archives de France-CGT, informé de cette demande, a décidé de contre-attaquer en réfutant l’idée de surfaces rendues disponibles par le déménagement d’une partie des archives à Pierrefitte. Pour la CGT, « le rapport Magnien-Notari aboutirait au démantèlement des Archives nationales », « un véritable hold-up » des surfaces actuelles et des linéaires. Le syndicat a rendu public un rapport concurrent de 80 pages, visant à démontrer l’impossibilité de rendre disponible une partie des locaux dans une perspective d’enrichissement d’ici trente ans.

Magasins inondables
Paris conserve les archives datant de l’Ancien Régime et le Minutier central des notaires, dont l’arriéré de collecte est important. C’est principalement sur cette donnée que les avis divergent. Pour la CGT, le site parisien devrait disposer de 71,6 km linéaires d’ici trente ans, contre 65,4 selon les recommandations du rapport Magnien-Notari : une différence de 6,2 kilomètres qui crée la discorde. L’autre point de désaccord réside dans l’appréciation des locaux inondables. Pour alléger les coûts de rénovation, le rapport Magnien-Notari préconise de conserver deux magasins d’archives sains, bien qu’inondables en cas de crue centennale de la Seine, leur déplacement étant jugé « réaliste » en cas d’urgence – ce que conteste la CGT.

Le rapport Magnien-Notari, en réaffectant les espaces, rend disponibles plus de 8 000 mètres carrés concentrés à l’est du quadrilatère, dans les bâtiments situés à l’angle de la rue des Quatre-Fils et de la rue Vieille-du-Temple : les communs de Rohan, les bâtiments des stages, de Boisgelin, « Affaires étrangères », « Guerre » et « Temple », après remise aux normes des grands magasins Napoléon III situés à l’ouest et qui devront abriter le Minutier central.

Évalués à près de 35 millions d’euros, hors monuments historiques, les travaux pourraient être mis en œuvre à partir de 2014, avec en ligne de mire la revalorisation des espaces du musée, dans les hôtels de Rohan et de Soubise. Le remontage des décors de la Chancellerie d’Orléans à Rohan, décidé en 2011 et très attendu depuis, attend une nouvelle scénographie. Un partenariat avec le Mobilier national et le Louvre pourrait permettre au musée, qui souffre d’un manque de visibilité, d’améliorer son contenu et d’ajouter des ressources propres à l’institution. À Paris, de grands chantiers attendent les Archives.

Légende photo

L'hôtel de Rohan-Soubise, à Paris. © Photo : Alno.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°399 du 18 octobre 2013, avec le titre suivant : Bataille de chiffres aux Archives

Tous les articles dans Actualités

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque