Histoire de l’art

Voyage au bout du romantisme

Un panorama inédit sur la diversité du courant en Europe

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 5 juin 2013 - 656 mots

La maison Citadelles & Mazenod inaugure une nouvelle et luxueuse collection, consacrée aux grands mouvements artistiques en Europe, avec Le Romantisme signé Maria Teresa Caracciolo.

Publié en parallèle à deux grandes expositions parisiennes qui, chacune, abordent le romantisme sous un angle précis – le paysage allemand au Musée du Louvre (« De l’Allemagne », jusqu’au 24 juin) et le sublime au Musée d’Orsay (« L’Ange du bizarre », jusqu’au 23 juin) –, le présent ouvrage offre une vision complète d’un mouvement à dimension européenne.

Chercheure au CNRS, l’historienne de l’art Maria Teresa Caracciolo se réclame en premier lieu de Mario Praz, spécialiste de l’histoire culturelle européenne dont l’étude du romantisme noir a largement inspiré les commissaires de l’exposition d’Orsay. Elle n’a pas tenté de retracer l’histoire de la peinture romantique, ni de proposer une nouvelle définition du terme, tâche ardue pour ne pas dire vaine. L’auteure a choisi d’inviter le lecteur à s’immerger dans ce courant artistique à partir de ses œuvres (littéraires et picturales), de ses écrivains, poètes et peintres, mais aussi de ses personnages de fiction les plus emblématiques. Elle prend, par exemple, pour point de départ la première représentation du Don Giovanni de Wolfgang Amadeus Mozart au Théâtre national de Prague en 1787. L’opéra s’achevait alors sur une scène joyeuse dans laquelle toutes les victimes de Don Giovanni se réjouissaient de la damnation de leur tourmenteur. Six mois plus tard, le compositeur décidait d’éliminer ce final et de conclure le spectacle sur la scène précédente, émaillée par les cris de souffrance du séducteur jeté en enfer.

Don Giovanni, Faust ou encore le jeune Werther sont autant de personnage-clés que l’historienne met en exergue dans son préambule, pour saisir au mieux une époque montrant les premiers symptômes d’une crise de la Raison, qui, au cours du XVIIIe siècle, avait mis toute l’Europe au pas. Tandis que les Lumières se tamisaient, « sous un ciel où Dieu n’était plus, l’esprit humain, riche d’une connaissance plus vaste, grandi par la pensée et toujours, sinon encore plus assoiffé d’absolu, devait inventer de nouvelles voies », relate Maria Teresa Caracciolo.

Fraternité entre les arts
Loin de toute ambition exhaustive, l’ouvrage s’applique à identifier les racines du romantisme et opère la distinction entre ses différentes veines – en Allemagne (où il est né dans les années 1770, porté par le Sturm und Drang), en Angleterre (où il développa un penchant pour le gothique), en Scandinavie (avec un retour à l’imaginaire des légendes).

La France se distingue par une cristallisation tardive du mouvement, avec la célèbre « bataille d’Hernani » en 1830 opposant les Anciens et les Modernes. Mais aussi par son appétit de vivre, en dépit d’une angoisse existentielle prégnante : « En France, l’âme romantique révéla son versant enthousiaste, actif, innovateur, à l’écoute des événements contemporains et placés à leur service. » Littérature à l’appui, l’historienne de l’art cite in extenso des extraits de textes fondateurs signés Goethe, Lord Byron, Hugo…, et souligne ainsi le lien très fort qu’ont tissé poésie et peinture romantique. Car, insiste Maria Teresa Caracciolo, la fraternité entre les arts (musique, chant, peinture, littérature…), active dans les cercles de Dresde et d’Iéna, est caractéristique de cette nouvelle vague pour laquelle l’émotion était devenue la source du plaisir esthétique.

Après s’être attardée sur plusieurs artistes incontournables du mouvement, tels Caspar David Friedrich (pour lequel le paysage est un instrument de méditation entre l’homme et la nature, autrement dit le divin), Turner, Delacroix, Géricault ou encore Goya, l’auteure dégage les grandes tendances de la peinture romantique, qui vont du paysage de l’âme à l’évolution de la peinture d’histoire, en passant par l’autoportrait et sa nouvelle dimension psychologique. Et conclut, à l’instar de l’exposition du Musée d’Orsay, sur la réinvention du romantisme au XXe siècle à travers le surréalisme. Pensé pour le plus grand nombre, cet ouvrage se lit comme une galerie de portraits richement illustrée des différents acteurs du romantisme et donne envie d’approfondir ses connaissances.

Le Romantisme dans les arts, Maria Teresa Caracciolo, éd. Citadelles & Mazenod, coll. « Les grands mouvements et tendances », 2013, 464 p., 320 ill. couleurs, 189 €.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°393 du 7 juin 2013, avec le titre suivant : Voyage au bout du romantisme

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