Antiquaires - Le calendrier serré d’Eurantica

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 10 avril 2013 - 809 mots

Eurantica Brussels Fine Art Fair, une foire très éclectique, a augmenté sa fréquentation de 10 % mais peine à trouver sa place.

BRUXELLES - En déambulant à travers les stands soigneusement mis en scène par les antiquaires et galeristes, l’éclectisme de la dernière édition d’Eurantica Brussels Fine Art Fair, qui s’est tenue du 15 au 24 mars, sautait aux yeux. Cependant, comme en 2012, la part belle était faite au design et au vintage des années 1930 à 1960 et des années 1950 à 1980, toujours dans l’intention d’insuffler un nouveau dynamisme à l’événement. Le défi était double. Accrocher un public plus jeune et souligner l’intérêt d’un mélange savamment pensé entre le classicisme et le design. Pour Luc Darte, directeur de la foire, le pari est en partie gagné : « Le public a rajeuni puisque la moyenne d’âge se situe aux alentours de 35-40 ans et il y a eu 10 % de fréquentation en plus par rapport à l’année dernière. Les tableaux toutes périodes confondues, les objets et les bijoux ont bien marché, mais le mobilier classique a peiné. » Gilles Linossier, antiquaire installé quai Voltaire, spécialiste du mobilier du XVIIIe siècle et fidèle au salon depuis douze ans, renchérit : « C’est une année décevante qui confirme que le mobilier est en crise. » La très grande commode de Guillaume Beneman (150 000 euros) qu’il exposait n’a pas trouvé preneur.

Côté céramique, les exposants sont globalement satisfaits. Selon Laurence Lenne, établie à Ath (Belgique), ils ont « pas trop mal travaillé ». Elle-même a vendu deux vases en porcelaine de Vincennes dès la soirée d’inauguration, ceci à un marchand venu de Tefaf (The European Fine Art Fair à Maastricht) ! De l’avis général, ce sont les grosses pièces qui sont parties. « Eurantica est très proche [dans le temps] de la Brafa [Brussels Antiques and Fine Art Fair] et pour ceux qui participent aux deux événements (30 %), c’est difficile de se reconstituer un stock en un mois et demi, on a quelques grosses pièces et après, on fait avec ce qui reste », confie Laurence Lenne.
Des visiteurs se sont livré au jeu des comparaisons entre les deux salons. « La Brafa, on y va pour regarder, Eurantica, on y va pour acheter », lancait l’un d’entre eux. Pour la galerie Polyèdre, « ceux qui viennent ici ont l’impression qu’ils vont faire des affaires. Mais une semaine de salon, c’est trop long. Il vaut mieux cinq jours intensifs : il y a plus d’engouement et cela pousse à la vente. Aussi, c’est un salon qui a beaucoup perdu et qui a du mal à se positionner par rapport à la Brafa ».

Objets très décoratifs
L’art contemporain est resté assez marginal. Si, de loin, on semblait apercevoir plusieurs œuvres de Jean-Michel Basquiat chez Cortade’Art (Montauban), il s’agissait en fait d’œuvres de Benjamin Borvon et de Victor Hasch. « Les tableaux d’une main incertaine nuisent à la qualité du salon », s’insurgent plusieurs personnalités, parmi lesquelles Jan De Maere, un des experts du comité et ancien président de la Brafa. Quant à l’idée d’ouvrir exactement aux mêmes dates que Tefaf cette année, les marchands s’accordent à dire que cela leur a porté préjudice : « Mieux vaut que les dates se chevauchent seulement, car là, il manquait des acheteurs », estime François Golenvaux, de la Galerie belge. « Eurantica est en recul en termes de qualité et beaucoup de stands ressemblent plus à de la décoration qu’à de l’art », poursuit-il. On pouvait constater en effet la présence en nombre d’objets très décoratifs, comme sur le stand de Yannick David, véritable cabinet de curiosités. « Le Belge adore ça, il est très collectionneur et très éclectique dans ses choix », défend ce dernier.

Eurantica semble donc en perte de vitesse du fait de sa difficulté à se positionner, tant sur le plan de la qualité des objets présentés au regard des autres foires que sur celui du calendrier, qui ne lui est pas propice : plus tôt dans l’année se tient la Brafa ; plus tard, les beaux jours arrivent, ennemis des salons. Mais pour Vincent L’Herrou, venu du Louvre des Antiquaires à Paris, « Eurantica est une foire avec beaucoup de potentiel. Bruxelles est au centre de l’Europe, il y a du passage et elle se situe à une heure de l’Allemagne, de Londres, du Luxembourg, des Pays-Bas et de Paris ! ».
Pour une personnalité belge présente sur le salon, « c’est une foire parallèle où le goût et la créativité ont plus à faire que la valeur ou la signature. Elle a un esprit plus “décorateur”, qui fonctionne au coup de cœur. On peut un peu plus rêver qu’à Tefaf, inaccessible ». La moyenne des prix se situe en effet aux alentours de 10 000 euros, rien ou presque ne dépasse  100 000 euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°389 du 12 avril 2013, avec le titre suivant : Antiquaires - Le calendrier serré d’Eurantica

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