Artistes et galeries à travers le monde (16 mars 2001)

L’actualité de l’art contemporain

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 16 mars 2001 - 1194 mots

PARIS
« Warhol s’est intéressé à moi non pas pour mes cheveux blonds, ma jeunesse et mon énergie bondissante mais grâce au succès que j’avais déjà réalisé. Andy aimait le succès. La seule chose qu’il aimait plus que le succès, c’étaient les jeunes gens qui avaient du succès », explique Christopher Makos, lorsqu’il évoque sa rencontre avec Andy Warhol. Les portraits exposés aujourd’hui à la JGM. Galerie sont le résultat d’une expérience unique à laquelle Warhol s’est prêté en 1981, avec le souvenir de Marcel Duchamp, travesti et photographié par Man Ray soixante années auparavant. Remettant en cause son identité sexuelle, le maquillage, les perruques et les attitudes transforment Warhol, qui échappe à son image, révélant un personnage mélancolique et angoissé. La plus grande partie du travail de Makos a résidé dans la nuance : le placement des mains, les expressions du visage, un instant figé…

JGM. Galerie, 8 bis rue Jacques-Callot, 75006 Paris, tél. 01 43 26 12 05, jusqu’au 14 avril.

Après l’exposition « Rouge », la galerie Valérie Cueto s’immisce dans l’univers des « Girls on top ». Par des photographies et vidéos contemporaines parfois provocatrices, du travestissement au voyeurisme, d’une image ethnique à une étude anatomique, chacune de ces œuvres utilise son propre exutoire. Celles d’Annette Messager, Margaret Cameron, Berenice Abbott, Cindy Sherman, Vanessa Beecroft, Nan Goldin et Pipilotti Rist côtoient les créations de jeunes talents telles Flo Lunn, Mia Enell ou Kimiko Yoshida… Au total, 29 artistes « on top » ont été réunies.

Galerie Valérie Cueto, 10-12 rue des Coutures-Saint-Gervais, 75003 Paris, tél. 01 42 71 91 89, du 19 mars au 7 avril (jusqu’au 19 mars sur rendez-vous).

À mi-chemin entre illusion et réalité, les œuvres du sculpteur Jean Stern et de la peintre Josée Pitteloud brouillent notre rapport au monde. Dans l’exposition à la galerie Bernard Jordan née d’un collaboration avec MIRE, de Genève, le premier renouvelle l’art du relief et interroge tout espace architectural. Réalisés à partir de matériaux de construction récupérés et assemblés en volumes géométriques simples, ses reliefs, tel Horizon II, sont difficilement identifiables. En effet, l’œil se perd entre la reconnaissance d’un volume et sa représentation modelée en grisaille. Les masses lumineuses et floues peintes par Josée Pitteloud semblent jouer de subtils déséquilibres sur la surface. La peinture continue sur les tranches de la toile, au plus près du mur, pour accentuer la perception visuelle.

Galerie Bernard Jordan, 5 rue Chapon, 75003 Paris, tél. 01 42 77 19 61, jusqu’au 31 mars.

Les « morceaux de couleurs » de Günter Umberg exposés à la galerie Évelyne Canus se présentent comme une variation infinie sur une unique couleur ou non couleur, le noir. Plus que la toile elle-même, l’artiste préfère l’épaisseur des panneaux de bois ou d’aluminium. Résultat d’une superposition des couches de pigments, l’œuvre monochrome est intrinsèquement éclaircie de bleu, de vert ou de rouge sombre. Le noir de Günter Umberg dépend donc de chaque couleur posée et constitue pour lui une couleur autonome.

Galerie Évelyne Canus, 2 rue du Roi-de-Sicile, 75004 Paris, tél. 01 42 76 02 48, jusqu’au 28 avril.

Depuis le milieu des années 1990, Mark Lewis expérimente les critères de production du cinéma et le mode de présentation des œuvres. Parlant de « cinéma en pièces », l’artiste refuse toute complétude. Le temps d’une bobine de pellicule, le film muet Centrale, 1999, se rapproche de la conception de Fernand Léger d’un cinéma pur, qui n’est que le moyen de faire voir des images : derrière une fenêtre, une rue, un homme et une femme bavardent puis s’ignorent, des gens apparaissent et disparaissent... Présentés à la galerie cent8, les films attendent le visiteur, qui pourra poursuivre son périple devant les peintures de Marthe Wery et Susanna Fritscher. Venise 82 est un point de départ dans le travail de la première, dans la veine du monochrome. Toutefois, les couches de couleurs superposées, leurs réactions les unes sous les autres, relèvent fondamentalement d’une « expérience de la couleur ». Limitée au blanc et au gris, la peinture de Susanna Fritscher joue sur la matière et les contradictions : blanc/gris, lumière/ombre, opacité/transparence, frontalité/profondeur.

Galerie cent8, 108 rue Vieille-du-Temple, 75003 Paris, tél. 01 42 74 53 57, jusqu’au 21 avril.

Pour la première fois, le sculpteur américain Clay Ketter expose ses travaux en France, à la galerie Daniel Templon. Fasciné par l’univers des chantiers, il allie la pratique artistique au travail manuel, selon sa maxime « Labor and art ». La série des Wall Paintings (1993), composée de deux panneaux de Placoplâtre, exalte la peinture en une forme pure et vide de contenu. Ajoutant de la tapisserie, des couches de peinture et d’enduit aux plaques initiales, Ketter situe la série « Trace Paintings » (1995) entre art, artisanat, construction et déconstruction. Enfin, intrigué par les cuisines intégrées, l’artiste explore ce phénomène en créant des meubles dénués d’utilité, dont la structure elle-même (les étagères sont tronquées) interdit toute fonction. La forme sur le motif de la grille touche à l’abstraction.

Galerie Daniel Templon, 30 rue Beaubourg, 75003 Paris, tél. 01 42 72 14 10, jusqu’au 21 avril.

Avant son déménagement, la galerie Anne de Villepoix a proposé à huit artistes d’intervenir une dernière fois dans ses locaux de la rue des Tournelles. Préférant les réflexions sur le support et le volume, la statique et le mouvement, les œuvres de « Let’s move » occupent massivement les lieux. Chris Burden poursuit sa quête des frontières et des limites, les propositions hybrides de Fabrice Hybert cherchent le décalage, Suzanne Lafont étudie les interactions du corps sur son environnement, et Fabien Lerat explore un espace dans l’espace. À côté de Barthélémy Toguo et des sculptures de Jean-Luc Moulène, Joyce Pensato passe de la toile aux murs, et Franck Scurti interroge l’œuvre dans sa globalité. La manifestation est volontairement évolutive. Les installations pourront changer selon les désirs du créateur et ce jusqu’à sa fin annoncée.

Galerie Anne de Villepoix, 11 rue des Tournelles, 75004 Paris, tél. 01 42 78 32 24

« Il faut douter de tout, y compris de nos larmes », explique Denis Castellas, dont l’œuvre est hantée par les ombres et les silhouettes bleuies du souvenir. Après le Musée Picasso à Antibes, ses peintures récentes – des figures souvent fixées au polaroïd, pâlies par la photocopie et retravaillées au dessin – ont rejoint la galerie Carousel, à Paris.

Galerie Carousel, 4 rue de Jarente, 75004 Paris, tél. 01 44 61 97 27, jusqu’au 31 mars.

Louise Bourgeois emploie tout l’espace de la galerie Karsten Greve, avec ses sculptures en tissus confectionnées pour l’occasion, ses installations comprenant ses propres vêtements et des œuvres sur papier. Depuis la fin des années 1980, l’artiste travaille à la réalisation d’œuvres monumentales, Les Cellules, par lesquelles elle construit sa propre architecture pour y abriter ses objets. L’espace créé par Cell VIII fait ainsi référence à des souvenirs d’enfance, lorsqu’elle se cachait derrière les tapisseries suspendues dans l’atelier de restauration de ses parents. Parallèlement, de manière plus crue et violente, ses figures en tissus rembourré nous donnent à voir une image mutilée du corps humain, évoquant une souffrance à la fois mentale et physique.

Galerie Karsten Greve, 5 rue Debelleyme, 75003 Paris, tél. 01 42 77 19 37, jusqu’au 31 mars.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°123 du 16 mars 2001, avec le titre suivant : Artistes et galeries à travers le monde (16 mars 2001)

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