Patrimoine

Cure de « câlinothérapie » aux Monuments nationaux

Philippe Bélaval, le nouveau président du Centre des monuments nationaux soigne ses équipes tandis que sa tutelle le ménage

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 30 octobre 2012 - 878 mots

Aidé par un budget 2013 relativement clément, Philippe Bélaval, le nouveau président du Centre des monuments nationaux veut calmer le jeu dans son établissement public. S’il laisse plus d’initiatives aux équipes locales, le financement de la restauration des monuments reste une équation difficile à résoudre.

PARIS - Cinquante sites en trois mois. Le nouveau président du Centre des monuments nationaux (CMN), Philippe Bélaval ne ménage pas ses efforts pour apaiser le climat social, mis à mal selon les syndicats et l’Inspection générale des affaires culturelles par le comportement de son prédécesseur. « Aujourd’hui le dialogue est rétabli », a-t-il tenu à préciser lors d’un point presse, « les organisations syndicales siègent à nouveau normalement dans les instances représentatives ». Philippe Bélaval ne vient pas les mains vides lors de ses visites sur le terrain. Pour remotiver les troupes déprimées par un centralisme parisien pesant, il a annoncé la fin des saisons culturelles à thème unique, trop contraignantes et qui ne laissaient pas assez d’initiatives aux équipes locales. Après le cinéma en 2011 et les animaux en 2012, l’imaginaire sera donc la dernière thématique jacobine. Les employés du siège situé dans le magnifique hôtel de Sully en plein cœur du Marais, ne sont pas oubliés non plus, ils n’auront pas à subir la présence d’un salon de thé Angelina qu’Isabelle Lemesle, l’ex-présidente, voulait installer dans l’Orangerie. Il est vrai que la rentabilité de cette concession était douteuse, en contrepartie de travaux de mise aux normes d’un montant estimé à près d’un million d’euros, le Centre ne recevait annuellement que 80 000 euros de redevance de la part du concessionnaire. Le nouveau président indique au passage que la convention Novelli-Mitterrand de 2009, qui visait à installer des hôtels et restaurants dans les monuments historiques, a du plomb dans l’aile. Aucun projet n’a vu le jour.

Philippe Bélaval dispose d’autres atouts pour mettre de l’huile dans les rouages. La fréquentation des sites a été bonne en 2011, plus de neuf millions de visiteurs et les premiers indicateurs de 2012 restent satisfaisants malgré une situation contrastée : « Paris et notamment l’Arc de triomphe tirent les chiffres vers le haut ». Or les recettes de la billetterie comptent pour plus de la moitié du budget de fonctionnement de l’établissement public (85 millions d’euros) qui, grâce à ses autres activités commerciales (éditions, locations d’espace), parvient même à s’autofinancer à hauteur de 77 %, un record. Et si comme tous les opérateurs de la culture, « le CMN doit payer son écot au redressement des finances publiques », la baisse de 2,5 % de la subvention de l’État pour charge de service public n’entraîne qu’une baisse de 0,5 % de son budget de fonctionnement. « Il faudra faire preuve d’imagination pour animer les sites dans ce contexte d’économies », affirme Philippe Bélaval, qui cite comme exemple de programmes peu coûteux des lectures de texte par des comédiens. La ministre a également ménagé son ancien directeur général du Patrimoine, en ne lui imposant qu’une baisse de onze postes, neuf sur les 942 que compte l’établissement en propre et deux sur les 457 postes pris en charge par les crédits directs du ministère. En retour, il s’est engagé à embaucher quelques dizaines de jeunes dans le cadre du programme gouvernemental des Emplois d’avenir. De même, la ponction non pérenne de 4,7 millions sur la trésorerie est à relativiser, cette dernière était encore de plus de 100 millions en 2011.

Des restaurations titanesques
L’enjeu réside surtout sur les travaux de restauration des 100 monuments. La tâche est gigantesque. Ici l’unité de base c’est le million. Or le Centre ne peut compter en 2013 que sur une vingtaine de millions d’euros : treize sous forme de subvention d’investissement du ministère (contre 15 dans le PLF 2012) et huit provenant d’une taxe sur les jeux (contre 10 en 2012). Les seuls travaux du Panthéon coûtent à eux seuls 100 millions d’euros. Il faudra donc étaler les dépenses dans le temps. Les indispensables travaux de stabilisation du dôme (20 millions d’euros) sont répartis sur trois ans, tandis que la restauration de la célèbre colonnade est reportée. La résidence de la marquise de Pompadour à Champs-sur-Marne rouvrira cependant comme convenu en juin 2013, avec son mobilier, le château de la Motte-Tilly (Aube) au printemps 2013. Le parc et les espaces de réception de la villa Cavrois (Nord) devraient eux, être accessibles au public en juillet 2013, tandis qu’il faudra attendre 2015 pour les appartements. Les chantiers en cours ou urgents sont nombreux : le Mont-Saint-Michel, la Sainte-Chapelle, Azay-le-Rideau.  Sans compter ce que le « câlinothérapeute » va découvrir en visitant les 46 autres sites.

Un financier à la tête de la direction du Patrimoine

Autant Philippe Bélaval pouvait se prévaloir d’un solide parcours dans la culture lorsqu’il a été nommé en 2010 à la direction générale du Patrimoine, autant son successeur Vincent Berjot affiche un profil plutôt financier. Ce normalien de 45 ans, statisticien et agrégé de sciences sociales a passé l’essentiel de sa carrière dans des fonctions financières au ministère de l’Économie et des Finances de 1997 à 2010, puis à la Mairie de Paris. Un choix par défaut, dit-on, la ministre voulait une femme. Il y avait bien l’actuelle directrice des musées, Marie-Christine Labourdette, mais elle est trop marquée politiquement.

Légende photo

L'hôtel de Sully © Caroline Rose - Centre des monuments nationaux

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°378 du 2 novembre 2012, avec le titre suivant : Cure de « câlinothérapie » aux Monuments nationaux

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