Contre toute attente

PARIS - L’année 2000 a été pour la Fiac l’année des one man shows et 2001 résonne encore de cet épisode. Nombreux sont ceux, encouragés par les organisateurs, qui ont reconduit cette formule (74 galeries sur les quelque 164 présentes). Ainsi, la galerie Air de Paris a opté pour trois présentations individuelles successives. « Ce que nous voulions atteindre était plus qu’un objectif de vente, explique Florence Bonnefous. Ainsi, Jean-Luc Verna a pu montrer un nouveau travail qui a très bien marché. Quant à François Curlet, il n’a pas encore eu d’exposition personnelle à la galerie, et il s’agissait pour nous d’indiquer sa présence. Enfin, présentée les premiers jours, Amy Vogel a lié de nombreux contacts et ses dessins se sont très bien vendus. » La galeriste remarque toutefois qu’il y avait « un peu moins de monde » que l’an passé. « Le temps n’est plus au voyage », admet Caroline Smulders directrice de la galerie Thaddaeus Ropac qui souligne la quasi-absence des Américains, des Allemands, et des Italiens. Mais le choix d’un stand entièrement consacré à Philippe Bradshaw, remarqué pour ses compositions mixtes alliant décors de chaînes et vidéo, n’était pas pour la galerie installée à Salzburg et Paris un choix « commercial ». Malgré ce geste « risqué », des pièces vendues à 150 000 francs ont trouvé preneur.

Nouveauté de la Fiac, l’espace « Vidéo cube » consacré à des projections vidéo, s’il a été bâti sur un constat juste, a toutefois fait l’objet de critiques. Ainsi la galerie Chantal Crousel remarque une organisation générale de plus en plus performante, mais déplore le mauvais fonctionnement de ce lieu où elle montrait deux pièces. Outre une participation financière de 15 000 francs et la location du matériel vidéo, ses choix ont aussi été soumis à un jury. Il lui a ainsi été demandé de montrer Nocturnes (1999) d’Anri Sala, alors qu’elle proposait des travaux beaucoup plus récents de ce dernier. Une opération purement prestigieuse (le jeune artiste s’est vu distingué d’un prix) puisque la galeriste souhaite céder le seul exemplaire restant de cette édition de six à une institution américaine. Pour le reste, l’enseigne parisienne affiche des nouveaux acheteurs et de très bons résultats, malgré des prévisions pessimistes. Pierre Nahon de la Galerie Beaubourg fait un constat proche. « Contre toute attente, la Foire a marché. Je pensais aller là en ‘touriste’ et j’ai vendu, et même assez bien, se félicite-t-il. J’ai vendu un Warhol à un Américain, mais c’est une exception », ajoute ce dernier qui a retrouvé ses collectionneurs habituels. Avec un stand consacré à l’art américain, il regrette toutefois le peu d’« art contemporain historique » à la mesure des pièces
qu’il présentait.

Directeur de la galerie Gmurzynska (Cologne) et vice-président du Cofiac (Comité de sélection de la Foire) pour ces six dernières années, Mathias Rastorfer juge lui la manifestation de plus en plus internationale et contemporaine : « Le contemporain est de plus en plus présent et le moderne désormais minoritaire, cela donne une direction claire à la Fiac. Après trois ans au Quai Branly, et maintenant deux ans à la porte de Versailles, la Foire a trouvé sa définition. Dans ce sens, la nomination pour me succéder à la vice-présidence du Cofiac de Jill Silverman Van Coenegrachts de la Lisson Gallery est une bonne chose. » La Foire a-t-elle aussi trouvé son marché intérieur ? Le constat du galeriste allemand le laisse entendre : « Il y avait beaucoup plus de collectionneurs français. Les Américains et les Allemands étaient absents, mais la Foire a quand même été un succès ».