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Festival Croatie : « Il a fallu tout bâtir en moins d’un an »

Isabelle Delage, commissaire générale pour la France de « Croatie, La voici »

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 18 septembre 2012 - 793 mots

Issue d’un double parcours effectué au service de directions régionales aux Affaires culturelles et de collectivités territoriales, Isabelle Delage, qui a notamment été en charge de l’Année du Brésil à Cergy-Pontoise, est depuis juin 2011 la commissaire générale pour la France de « Croatie, La voici », Festival de la Croatie en France.

Jean-Christophe Castelain : Comment cette saison a-t-elle été décidée ?
Isabelle Delage
  : Le principe d’un festival de la Croatie en France a été arrêté en 2010 entre François Fillon, alors Premier ministre, et son homologue croate. La Croatie doit en effet intégrer l’Union européenne le 1er juillet 2013. La France est le seul pays à organiser une saison croate dans ce contexte, car elle est la seule à disposer d’un tel outil. Notre pays continue à bénéficier à l’étranger d’une image forte, et si nous voulons entretenir nos sources d’inspiration, il nous faut accueillir les autres cultures. La Croatie est un petit pays qui va compter.

J.C.C. : Quelle est l’image de la Croatie en France ?
I.D.
  : Une image très touristique. Indépendante en 1991, la Croatie a lancé dès 1998 une campagne stratégique pour se faire connaître avec un slogan porteur : « La Méditerranée s’agrandit ». La Croatie, qui est à deux heures de vol de Paris, dispose d’un patrimoine formidable. Environ 400 000 touristes français s’y rendent chaque année. On constate cependant une forte méconnaissance de la création croate dans le grand public, mais aussi dans les institutions françaises. Comment cela s’explique-t-il ? Par une faible présence artistique croate en France qui se comprend pour plusieurs raisons. Il n’y a pas de frontière commune avec la Croatie et, politiquement, la France entretenait peu de relations avec la Croatie. Il y a une forte diaspora croate dans le monde, l’équivalent de sa population (environ 5 millions d’habitants), mais une faible en France, de sorte qu’il n’y a pas ici de relais d’opinion. Significativement, il n’y a pas d’institut culturel croate en France.

J.C.C. : Quels sont les temps forts de cette saison dans les arts visuels ?
I.D.
  : Beaucoup de grandes institutions parisiennes ont joué le jeu. Le Louvre va exposer dans la rotonde de Mars, au sein de son parcours antique, l’Apoxyomène, une statue en bronze qui atteste de la présence grecque en Croatie dans l’Antiquité. Celle-ci a été retrouvée dans l’Adriatique en 1996. Elle est très demandée à l’étranger, c’est une chance de l’exposer. Le Musée de Cluny va présenter une quarantaine de pièces du haut Moyen Âge, parmi lesquels des reliquaires exceptionnels. Dans le registre contemporain, Peter Knapp va présenter à la Cité internationale des arts une sélection de photographes croates. Le Palais de Tokyo va diffuser des vidéos contemporaines croates. Dans un domaine plus inattendu, le Musée de la chasse et de la Nature va exposer des cibles peintes, issues d’une longue tradition des sociétés de tir en Croatie, tandis que le « 104 » à Paris va accueillir une exposition itinérante intitulée « Les cœurs brisés ». Les gens sont invités à apporter des objets emblématiques d’une rupture amoureuse qu’ils ont pu vivre (cela va d’une petite culotte à une hache), et à documenter cet objet avec un petit texte.

J.C.C. : Avez-vous rencontré des problèmes particuliers dans l’organisation de cette saison ?
I.D.
  : Oui, le temps ! J’ai été nommée en juin 2011, et il a fallu tout bâtir en moins d’un an. Or il est très difficile de s’insérer dans la programmation des grandes institutions, qui est naturellement établie depuis longtemps. En définitive, on demande à tous les opérateurs de pousser les murs pour dégager de l’espace. Mais je suis satisfaite du résultat. Grâce aux relations de confiance avec nos amis croates et notamment la commissaire, Seadeta Midzic, nous allons organiser 60 événements dans 45 lieux. Je dois dire aussi que les opérateurs français se sont passionnés pour le sujet.

J.C.C. : La faiblesse du budget a-t-il été un problème ?
I.D.
  : On voudrait toujours pouvoir disposer de plus d’argent ! Notre budget est de 620 000 euros, dont 200 000 euros pour la communication. Nous ne finançons pas l’intégralité des manifestations, c’est une forme de fonds commun qui accompagne la production de certains projets. Un effet de levier en somme. L’événement est financé à parité entre la Croatie et la France, et, en France, les fonds proviennent paritairement du ministère de la Culture et du ministère des Affaires étrangères. Nos amis croates supportent en plus le coût du transport et des assurances.

J.C.C. : Un regret ?
I.D.
  : Oui, il manque une grande exposition sur l’avant-garde moderne croate, qui aurait pu se tenir au Centre Pompidou par exemple.

« Croatie, La voici », du 10 septembre au 30 décembre, 45 lieux. Programme : http://croatielavoici.com

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Site Internet croatielavoici.com

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°375 du 21 septembre 2012, avec le titre suivant : Festival Croatie : « Il a fallu tout bâtir en moins d’un an »

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