Prises de risque

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 9 juin 2006 - 758 mots

Réservés aux artistes émergeant au niveau international, les « Statements » offrent cette année vingt-deux expositions personnelles. Cinq galeries françaises sont présentes.

Fux esprits chagrins se plaignant du manque de nouveautés, en dépit de sa qualité, d’Art Basel, le cru 2006 de la section « Art Statements », qui fête son dixième anniversaire, devrait apporter quelques consolations. Car de nouveautés, il en est beaucoup cette année, tant en termes de sélection des galeries – dont beaucoup entrent à la foire pour la première fois –, que d’artistes véritablement émergents. Il est d’ailleurs notable que, à deux exceptions près, tous les artistes de ce secteur ont moins de 40 ans, puisque nés entre 1968 et 1977.
Obligeant les galeries à composer un solo show sur une surface de 36 m2, la particularité de ces « Statements » tient dans la notion même de projet. Ainsi que l’affirme Florence Bonnefous (Air de Paris, Paris), membre du comité de sélection des sections « Statements » et « Art Premiere », aux côtés d’Esther Schipper (Berlin), Toby Webster (The Modern Institute, Glasgow) et Jochen Meyer (Meyer Riegger, Karlsruhe), « il est nécessaire de concevoir un projet de mini-exposition personnelle avec des œuvres qui entretiennent entre elles de forts liens esthétiques et conceptuels, ce qui d’emblée fait tomber beaucoup de propositions, même émanant de très bons artistes ».
En effet, la sélection se devait d’être sévère et rigoureuse, pouvant retenir seulement vingt-deux projets sur plus de deux cent cinquante déposés. Des projets qui quittent le premier étage de la foire pour s’installer dans un nouvel espace aménagé à l’entrée de la grande halle accueillant « Art
Unlimited ».
Signe d’une volonté de renouvellement, aucune des galeries présentes l’an dernier n’a été reconduite. Toutes n’ont pourtant pas quitté la foire, certaines ayant migré vers d’autres sections.

Scène de l’art
Cinq galeries parisiennes sont de la partie. Cent8, qui présentera une installation faite de plaques de Plexiglas imprimé et partiellement peint de Susanna Fritscher, Zürcher avec Mathilde Rosier et Jocelyn Wolff (lire p. 22) avec Clemens von Wedemeyer participent pour la première fois. Art: Concept et Chez Valentin étaient déjà présents, lors des éditions respectivement de 2001 et de 2004. Chez  le premier, Vidya Gastaldon édifiera notamment un tunnel long de 3 mètres fait de laine et fil de fer. On attend à la galerie Chez Valentin une installation de Pierre Ardouvin. Au théâtre ce soir (2006), en transformant le stand en salle de spectacle dont la partie scénique sera offerte à la circulation des visiteurs, devrait placer le public aux premières loges pour contempler le ballet du milieu de l’art ! De structure liée à la fabrication du spectacle il sera également question avec le projet de Clemens von Wedemeyer, qui a imaginé un étrange plateau de télévision déserté, sur lequel subsistent quelques restes d’un tournage.
Très attendu, Peres Projects (Los Angeles) présente Terence Koh. Il est à espérer que les créations récentes feront moins « Paul McCarthy revisité » que précédemment. Toute jeune et aussi émergente que ses artistes, Galería Comercial (Porto Rico), se taille un franc succès dans les rendez-vous internationaux. Elle expose ici l’artiste portoricain Jesús « Bubu » Negrón, toujours préoccupé par des questions politico-écologiques. Un aspect également abordé par Mungo Thomson, en particulier dans son Silent Film of a Tree Falling in the Forest (2005), film 16 mm montrant un déplacement parmi des arbres abattus dans la forêt (John Connelly Presents, New York).
Chez Barbara Wien (Berlin), Isa Melsheimer interroge les règles architecturales en matière de muséographie en « reconstruisant » le stand. Délaissant les murs de Barbara Thumm (Berlin), le Berlinois Ralf Ziervogel concentre son intense énergie créative dans des dessins panoramiques installés au sol. La finesse et la virulence de ses compositions promettent de longs moments d’observation.

Effets sensoriels
Les amateurs de peinture et de dessin pourront en outre s’arrêter chez Iris Kadel (Karlsruhe), qui expose les travaux emplis de symboles de la Canadienne Shannon Bool et les feuilles de l’Écossaise Lucy Skaer. Celle-ci tente d’exprimer l’inconnu dans des compositions curieuses, ni réelles ni oniriques (chez Doggerfisher, Édimbourg).
L’un des projets les plus intrigants pourrait bien être celui du Britannique Barnaby Hosking chez Max Wigram (Londres). Black Flood (2006) s’annonce comme une projection vidéo de 3,5 m x 4 m sur un tapis, partagé en deux zones blanche et noire, qui se répand des cimaises à l’intégralité du sol. Des vagues noires, au mur, envahissent progressivement l’espace, pour une installation voulant expérimenter « les effets sensoriels de la noirceur ». Une échappatoire efficace en cas de saturation visuelle ?

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°239 du 9 juin 2006, avec le titre suivant : Prises de risque

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