Jean-Marie Massaud

Du Chaudron au Volcan

Par Gilles de Bure · Le Journal des Arts

Le 23 juin 2006 - 501 mots

Au Mexique, Jorge Vergara, 50 ans, est considéré comme un parfait archétype de ce que les Nord-Américains appellent un « tycoon » (important homme d’affaires). Il est partout : dans l’industrie alimentaire, la production cinématographique, l’événementiel, la presse, le transport aérien…
Son projet le plus immédiat ? Édifier à Guadalajara, à l’ouest du Mexique, un considérable « Jorge Vergara Center » (JVC) aux activités multiples et dont les bâtiments (donc l’architecture) seront multiples. Vergara est un homme pressé et parfaitement informé. Il organise en un tournemain un séminaire architectural à Venise et y convie le gratin de l’architecture internationale : Zaha Hadid, Toyo Ito, Daniel Libeskind, Jean Nouvel… Le projet du JVC est donc en bonne voie et en bonnes mains.
Mais Vergara est un ouragan. Le voilà qui rachète l’équipe de football des Chivas, club centenaire aux 26 millions de « socios » et que les Mexicains chérissent comme les Français ont pu chérir le Stade de Reims, l’Association sportive de Saint-Étienne ou encore l’Olympique de Marseille… D’un coup, le JVC va s’enrichir d’un nouvel élément : un stade à la mesure du projet.
Un heureux coup du hasard fait se rencontrer le bras droit de Jorge Vergara et Jean-Marie Massaud. En à peine dix minutes, Massaud expose sa vision d’un stade, analyse la complexité existant dans cette double gestion du vide (période de non-activité) et du trop-plein d’énergie, s’interroge sur les valeurs sportives, l’échange, la démocratie, la fluidité… et fait l’éloge de la légèreté. Le bras droit séduit décide d’organiser un rendez-vous entre Vergara et Massaud.
Vergara est partout, c’est-à-dire nulle part. Le rendez-vous se monte successivement à Madrid, Venise et Paris. À chaque fois, Massaud s’y retrouve seul. Finalement, les deux hommes se rencontreront à Barcelone puis à Mexico.
Enfin, le stade prend forme. Au fameux « chaudron », Massaud et son associé, Daniel Pouzet, vont substituer un volcan, élevant dans le paysage de Guadalaraja une imposante colline verte enfermant en son cœur le stade proprement dit. Le « bol » devient dès lors un cratère, et le « chaudron », un volcan. D’autant qu’au-dessus du cratère, un gigantesque nuage blanc se matérialise, évoquant irrésistiblement le réveil du volcan. Soit une architecture mécano-textile d’une évanescente légèreté et qui se transforme en écran instantanément. Mais la colline ne fait pas qu’accueillir ce grand stade de 42 250 places. Des magasins, des cafés, un restaurant, un cinéma, un espace réservé aux enfants et le musée du club Chivas lui tiennent compagnie. Et c’est là, sous la colline, que Massaud et Pouzet installent également les parkings, concédant ainsi les abords du stade – d’habitude traités comme de dangereux et inhospitaliers délaissés – au seul paysage. Ainsi donc, le « Volcano Stadium », dont l’ouverture est prévue en mars 2007, exprime à merveille l’énergie tellurique comme l’énergie sportive, tout en créant un paysage spécifique en parfait accord avec l’esprit du temps. Avec en point d’orgue, ce nuage immobile et quasi impalpable qui, tout en donnant son identité à l’ensemble, entretient le mystère.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°240 du 23 juin 2006, avec le titre suivant : Du Chaudron au Volcan

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