Italie

Francesco Rutelli, une certaine vision de la culture

Le Journal des Arts

Le 23 juin 2006 - 717 mots

Ancien maire de Rome, il est le nouveau ministre des Biens culturels et du Tourisme. Un homme qui ne fait pas l’unanimité au sein de la communauté scientifique.

 ROME - Le ministère italien des Biens culturels est malchanceux et malmené par presque tous les gouvernements. Ce portefeuille a été demandé et obtenu, de façon inattendue, par Francesco Rutelli. L’ancien maire de Rome ajoute cette responsabilité à sa charge de vice-président du Conseil des ministres du gouvernement Prodi, tout juste constitué.
Le parcours politique de Francesco Rutelli a commencé en dehors des partis traditionnels, chez les radicaux et leurs batailles citoyennes et laïques sur le divorce, l’avortement et les droits civiques. Romain né en 1954, il est élu député pour la première fois en 1983 sur la liste du Parti radical, dont il était devenu le secrétaire national deux ans plus tôt. Réélu en 1987 et en 1992, il a présidé, pendant deux législatures, le Comité des droits de l’homme auprès de la commission des affaires étrangères de la Chambre des députés italienne. Sensible aux thématiques environnementales, il quitte le Parti radical en 1989 et cofonde une nouvelle formation politique : les « Verdi ARCObaleno » (Verts Arc-en-ciel). En avril 1993, il est nommé ministre de l’Environnement du gouvernement de Carlo Ciampi, mais il démissionne le lendemain, avec ses compagnons du PDS (Parti démocratique de la gauche), à la suite du refus de la Chambre des députés de lever l’immunité parlementaire de Bettino Craxi. La même année, il est élu premier magistrat de Rome. Il sera maire de la capitale italienne par deux fois avant 2000. Ayant su s’entourer d’une équipe efficace, il donnera un nouvel essor à la ville, laquelle, dans les années 1980, semblait résignée voir se poursuivre son déclin. Il sera récompensé par une réélection, avant de réussir à gérer brillamment les célébrations du Grand Jubilé. En 1999, il fonde, avec Romano Prodi et Antonio Di Pietro, le parti des Démocrates de gauche (DS). Il se fait élire au Parlement européen et, en 2001, se présente comme candidat du centre-gauche contre Berlusconi. De plus en plus proche des milieux catholiques, il fonde en 2002 le parti de la Marguerite, dont il devient le président.

Salvatore Settis, son opposant de longue date
Mais pourquoi le ministère des Biens culturels ? Tout d’abord en raison de son héritage familial : son arrière-grand-père fut un sculpteur reconnu. Mario Rutelli (1859-1941) est l’auteur de la statue d’Anita Garibaldi au Janicule, et de la belle fontaine des Naïades sur la place de la République, à Rome. L’intérêt de Francesco Rutelli en matière de tutelle des biens culturels est le résultat de longues années de militantisme, parmi les radicaux d’abord, au sein des Verts ensuite. Pourtant, en tant que maire de Rome, il s’est heurté maintes fois à Adriano La Regina, le surintendant archéologique de l’époque. Ce dernier s’est montré  scrupuleux et intransigeant dans le traitement de nombreux dossiers de projets urbanistiques. Parmi les différents désaccords figurent : le parking du Janicule, dont l’une des rampes d’accès recouvre une villa impériale ; le passage souterrain du château Saint-Ange qui sera finalement réduit ; le Musée de l’Ara Pacis, dont les fondations sont érigées sur des piliers souterrains ; la ligne de métro « C », refusée en raison des risques pour le Colysée. Cette ancienne inimitié pourra conduire Francesco Rutelli à démentir publiquement l’hypothèse, lors de la fête du parti de la Marguerite, en juillet 2004, de prolonger le mandat d’Adriano La Regina, proche de l’âge de la retraite.
Il faut s’attendre donc à un ministre fort, conscient de la nécessité d’une collaboration sans heurts entre ministère des Biens culturels et administrations locales. Sa première action a consisté à rencontrer Alberto Ronchey, ministre des Biens culturels en 1993, dans le gouvernement de Carlo Ciampi, et à effectuer une visite surprise de l’exposition « Raphaël » organisée à la Galerie Borghese.
La nomination de Rutelli est pourtant loin de faire l’unanimité, en particulier dans les rangs des spécialistes. Le choix de Salvatore Settis, directeur de l’École normale supérieure de Pise et éminent historien de l’art, recueillait au contraire l’assentiment général. Salvatore Settis a néanmoins accepté le 1er juin le poste de président du Conseil supérieur des Biens culturels que son opposant de longue date lui proposait, arguant qu’une collaboration reste malgré tout possible.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°240 du 23 juin 2006, avec le titre suivant : Francesco Rutelli, une certaine vision de la culture

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