Photographie

Déferlante Brassaï

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 22 septembre 2006 - 719 mots

Première du genre, la dispersion à Drouot de photos, dessins et sculptures issus
de la succession du photographe s’annonce comme un événement mondial.

 PARIS - La dispersion de la succession Brassaï est l’événement de la rentrée à Drouot. « Il s’agit du plus important ensemble d’œuvres de Brassaï jamais proposé en ventes publiques, d’autant plus attendu qu’il provient de la veuve de l’artiste, Gilberte Brassaï, décédée en 2005, elle-même héritière de la totalité de la succession Brassaï en 1984 », rapporte le commissaire-priseur Alexandre Millon. Pour cette vente, 561 photographies, 192 dessins, 12 sculptures et une tapisserie ont été prélevés de l’inventaire comportant plus de 2 000 œuvres et encore inachevé après un an de recherches. Mais « tout ce qui est important a été répertorié », rassure l’expert Christophe Goeury qui a travaillé sur ce fonds en collaboration avec Agnès de Gouvion Saint-Cyr, inspecteur général de la photographie au ministère de la Culture, en charge de la succession. Une partie de la succession Brassaï va enrichir les musées (plusieurs pièces ont déjà fait l’objet de dations), une autre est conservée par la famille, tandis qu’une sélection alléchante d’œuvres sont dispersées aux enchères afin de régler les droits de succession. Comptant 500 pages et proposé au prix de 80 euros (110 euros pour les 500 exemplaires sous coffrets numérotés), le catalogue tiré à 4 500 exemplaires s’est déjà largement vendu outre-Atlantique. Les acheteurs américains, collectionneurs et professionnels, devraient être au rendez-vous. La totalité de la vente est modestement estimée 2 millions d’euros. Un chiffre d’appel pour une flambée des prix programmée.

Le jour et la nuit
L’intérêt des futurs enchérisseurs va cependant à des lots précis. Le nom de Brassaï est associé aux images de Paris la nuit, et en particulier de Paris de nuit, ouvrage publié en 1932 et illustré par le photographe noctambule. Pavés, le tirage d’époque (1931) réalisé pour la couverture de ce livre, est l’une des stars de la vente. Cette photo mythique est estimée 40 000 à 60 000 euros. Les filles de joie, les couples d’amoureux, les voyous, les vues de Paris, l’ambiance des bars et des bals forment les diverses thématiques développées par Brassaï dans ses virées nocturnes. Des vintages, de rares tirages d’exposition et même des tirages contact d’images inédites différencient les formats de ces prises de vue dont les estimations oscillent de 300 à 20 000 euros. En l’absence de référence, il est difficile de faire des pronostics sur la partie « photographie de jour ». « Les nus sont magnifiques et rarissimes. Il en passe un à deux par an », défend l’expert. Plus sûrement, avec les célèbres portraits d’artistes et vues d’atelier de peintres et de sculpteurs tels Picasso, Miró, Maillol, ou d’écrivains – à commencer par Henry Miller –, l’attention se portera sur les importants clichés modernes que représentent les Graffitis, Grattages et Transmutations. Un tirage de Graffiti, série VII, de la collection Claude Berri, avait été adjugé 25 200 euros (cinq fois son estimation) chez Christie’s à Paris le 19 novembre 2005. La pièce maîtresse de la série dans cette vente, Graffiti (série IX, images primitives), est proposée pour 40 000 à 60 000 euros.
La grande originalité de cet événement est aussi de faire découvrir d’autres facettes artistiques de Brassaï. Mis à part le saisissant autoportrait (estimé 4 000 euros), le photographe n’a pas excellé dans l’art du dessin, comme en témoignent ses nus. Mais sa performance de sculpteur est étonnante. Qu’il s’agisse d’Astrée Blanche II, exécutée en 1971 dans un marbre blanc de Carrare (estimée 10 000 euros), de la Femme cygne de 1971 en bronze doré (estimée 6 000 euros) ou de la Déesse de la fécondité de 1967 sculptée dans un galet gris (estimée 5 000 euros), ces rares statuettes aux allures brancusiennes ont un succès assuré. Reste l’unique tapisserie de la vacation. Réalisée en 1972, intitulée Samouraï et estimée 5 000 euros, elle reprend le thème cher de Graffiti. Son sort en est jeté.

VENTE DANS LE CADRE DE LA SUCCESSION BRASSAÁ?, Gyula HALÁ?SZ, dit Brassaï (1899-1984) : PHOTOGRAPHIES - DESSINS - SCULPTURES - TAPISSERIE, vente les 2 et 3 octobre à Drouot-Montaigne, 15, avenue Montaigne, 75008 Paris, SVV Million & associés, tél. 01 47 27 95 34, www.brassai-succession-millon.com ; expositions publiques : les 29 et 30 septembre, 11h-21h, le 1er octobre 11h-18h.

Vente Brassaï

- Experts : Christophe Goeury (photographie), Cécile Ritzenthaler et Patrice Sonnenberg (dessins, sculptures et tapisserie) - Estimation : 2 millions d’euros - Nombre de lots : 764 (dont 561 photos)

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°243 du 22 septembre 2006, avec le titre suivant : Déferlante Brassaï

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque