Les Prix de l’art

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 17 novembre 2006 - 545 mots

Le prix de Rome offrait au XIXe siècle la perspective d’un séjour dans la capitale italienne et d’une carrière officielle. Qu’est-il de la nuée de récompenses qui foisonnent depuis quelques années ? Bien qu’ils s’appuient sur des institutions, comme le Guggenheim, qui administre le prix Hugo-Boss, ou Beaubourg, qui à sa façon pilote le prix Marcel-Duchamp, ces satisfecit affichent surtout une connivence croissante avec le marché de l’art. La remise du prix Ricard coïncide avec la tenue de la Foire internationale d’art contemporain (FIAC), celle du prix Marcel-Duchamp prend pied depuis deux ans sur ce salon, tandis que le lancement du Prix pour le dessin de Daniel et Florence Guerlain s’est greffé sur le salon Art Paris. L’an dernier, la liste des artistes sélectionnés pour le prix Hugo-Boss avait été dévoilée sur la foire Art Basel Miami Beach. Par une « heureuse coïncidence », le conteneur aplati de Jennifer Allora & Guillermo Calzadilla, duo nominé pour le prix Hugo-Boss, a aussitôt été acheté à Miami par un collectionneur portoricain…
Les artistes du Turner Prize bénéficient aussi à Londres d’une proximité de calendrier avec la foire Frieze Art Fair. En 2005, les œuvres des quatre artistes retenus avaient été pris d’assaut sur le salon. Cette année, la presse britannique a toutefois chahuté la sélection actuellement visible à la Tate Britain (jusqu’au 14 janvier). Le Times a même parlé d’un « prix en bout de course » et « d’un disque rayé », autant de qualificatifs qui ont dû freiner les collectionneurs ! D’ailleurs, contrairement à l’an dernier, les galeries des nominés ne les ont que faiblement valorisés sur la foire, à l’exception de Matthew Marks, qui a dédié une bonne partie de son stand à l’une des artistes, Rebecca Warren.

Ricard visionnaire
Volontairement ou non, le prix Ricard a du flair. Lauréat en 2005, Loris Gréaud avait déjà bénéficié d’une exposition au Plateau/FRAC Île-de-France puis à la galerie gb agency, à Paris. Cette année, le prix a été décerné à Vincent Lamouroux, jeune artiste dont la carrière démarre au quart de tour. Après avoir exposé en 2005 au Musée d’art moderne et contemporain (Mamco) à Genève, il présente actuellement une pièce monumentale au Palais de Tokyo. Il vient aussi d’intégrer la galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois (Paris). En revanche, le positionnement du prix Marcel-Duchamp, décerné par l’Association pour la diffusion internationale de l’art français (Adiaf), laisse plus perplexe ! Non que les artistes choisis soient mauvais, loin s’en faut. Mais la liste des nominés donne le sentiment que les ordonnateurs viennent après la bataille. Ainsi, Bruno Peinado, retenu cette année, aurait dû l’être dès 2004, alors qu’il avait bénéficié à la fois d’une monographie au Palais de Tokyo et d’une exposition personnelle sur le stand de la galerie Loevenbruck à la foire Liste, à Bâle. Quant au choix du lauréat, la logique plaide pour un artiste ayant déjà un pied à l’étranger. Le discret Philippe Mayaux figure ainsi dans les collections de l’Américain Blake Byrne et de l’Allemand Johannes Becker et est reconnu par de nombreux conservateurs de musées et artistes étrangers. La galerie Loevenbruck serait même en négociation pour une exposition dans une grande institution américaine et une entrée dans une puissante galerie new-yorkaise. Le prix Marcel-Duchamp aurait-il fait preuve de stratégie malgré lui ?

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°247 du 17 novembre 2006, avec le titre suivant : Les Prix de l’art

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