Commande publique

Carène d’un séjour

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 17 novembre 2006 - 589 mots

Le Centre national de l’estampe et de l’art imprimé, à Chatou, se dote d’une résidence amarrée sur la Seine. Parmi ses concepteurs figurent les designers Ronan et Erwan Bouroullec.

 CHATOU - Il y eut jadis sur terre, à Montmartre, un fameux Bateau-Lavoir habité par une multitude d’artistes. Voici maintenant sur l’eau, un siècle plus tard, la « Maison flottante » pour artiste, un lieu de résidence que le Centre national de l’estampe et de l’art imprimé (Cneai), à Chatou (Yvelines), vient d’inaugurer à deux enjambées de ses propres locaux, sur une berge charmante de « l’Île des impressionnistes ».
Le « bâtiment », œuvre des designers Ronan et Erwan Bouroullec, de l’architecte naval Jean-Marie Finot et de l’architecte Denis Daversin, est une commande publique de la Ville de Chatou, en partenariat avec le ministère de la Culture et de la Communication/direction régionale aux Affaires culturelles Île-de-France. L’objet est de prime abord assez intrigant, en particulier par l’aspect rugueux de cette coque entièrement en aluminium fabriquée par les ateliers Mouquet, au Havre. Ses mensurations parlent pour elle. Longueur : 23 m ; largeur : 5,10 m ; tirant d’eau (hauteur immergée) : 30 cm ; tirant d’air (hauteur depuis la surface de l’eau) : 3,62 m.
Son but premier étant de ne pas sombrer, la Maison flottante, d’un poids de 27 tonnes, a d’abord été pensée comme un bateau. « Les études de la carène ont été faites pour minimiser les mouvements au passage des péniches, avec peu de roulis, pour avoir une grande stabilité », explique Jean-Marie Finot, auteur notamment de plusieurs voiliers courant le Vendée Globe. Pour plus de sécurité, la Maison a aussi été amarrée à la berge grâce à quelques bracons et câbles d’acier.
Comme le lieu doit également servir de résidence pour accueillir jusqu’à deux artistes, il a été imaginé avec toutes les commodités nécessaires – deux chambres, un bloc-cuisine/salle de bains/W.-C. L’intérieur est sobre, mais plutôt cosy, habillé du sol au plafond d’essences exotiques. Surface totale : 110 mètres carrés, dont 23  mètres carrés de terrasses situées à l’avant et à l’arrière. Coût : 278 000 euros HT (hormis les honoraires des concepteurs et des bureaux d’études).

Maison-paysage
Si le côté sur berge est plutôt borgne, histoire de préserver l’intimité, le côté sur fleuve, lui, offre depuis les larges fenêtres du séjour/atelier des vues imprenables sur les méandres de la Seine. Au fil du temps, la Maison flottante est appelée à se fondre dans le paysage, la treille qui la recouvre de part en part devant se végétaliser entièrement. « Nous avons choisi à la fois des plantes caduques et des persistantes, comme la clématite sauvage, la passiflore ou la vigne vierge, afin qu’il y ait toujours de la végétation et ce quelle que soit la saison », précise Ronan Bouroullec. Ce qui devrait ôter à cette Maison flottante son côté brut de décoffrage pour lui donner, au final, un visage davantage bucolique.
Seul petit inconvénient : le bruit incessant et plutôt gênant des ribambelles de péniches qui passent sur le fleuve. Mais cela est bien peu de chose en regard de ce nouvel « outil » que possède désormais le Cneai. Puisse ce denier se saisir de cette occasion de se retrouver sur le devant de la Seine pour se faire mieux connaître… Premier à essuyer les plâtres, l’artiste Yann Sérandour effectuera sa croisière statique courant janvier 2007, en vue d’une exposition qui sera inaugurée le 10 février.

LA MAISON FLOTTANTE, CNEA

île des Impressionnistes, 78400 Chatou. Renseignements : 01 39 52 45 35 ou www.cneai.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°247 du 17 novembre 2006, avec le titre suivant : Carène d’un séjour

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