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Stonehenge en 1440

Par Martin Bailey · Le Journal des Arts

Le 15 décembre 2006 - 467 mots

Découverte dans un manuscrit conservé à Douai de la première représentation du célèbre site.

Douai - La plus ancienne représentation réaliste de Stonehenge (Wiltshire, Angleterre) vient d’être découverte au sein d’un manuscrit datant d’environ 1440, conservé à la bibliothèque municipale de Douai (Nord). Il s’agit d’un relevé vu du ciel des mégalithes avec leur structure circulaire et le détail de leur assemblage. Il illustre un texte historique intitulé Scala mundi (« Chronique du monde »), compilé au XIIIe siècle et copié en de multiples versions. Dans celle de Douai, qui ne compte que quatre illustrations, la vue de Stonehenge est la seule se rapportant à l’Europe (les autres figurent Adam et Ève, l’Arche de Noé et le Palais de Pharaon). Le manuscrit de Douai date l’édification du site aux alentours de 480-486 ap. J.-C., le texte latin la décrivant ainsi : « Cette année-là, Merlin, non par force mais par art, apporta et édifia le cercle du géant depuis l’Irlande jusqu’à Stonehenge, près d’Amesbury. »

Par magie
Ce texte fait écho à une légende voulant que Merlin l’Enchanteur ait transporté par magie les mégalithes depuis le mont Killaraus en Irlande jusqu’à Amesbury. Le centre du monument passait aussi pour abriter la tombe du roi Ambrosius (un modèle possible pour le roi Arthur). En réalité, la construction de Stonehenge est antérieure d’environ trois millénaires, et date vers 2300 av. J.-C. On connaît deux représentations de Stonehenge réalisées vers 1340, soit un siècle avant celle de Douai, mais toutes deux sont très schématiques et ne montrent pas la structure circulaire (British Muséum, à Londres, et Corpus Christi College à Cambridge).
Ainsi, l’illustration du manuscrit de Douai serait la première dessinée sur le motif. Elle tente également d’en montrer l’assemblage, avec des tenons pointant depuis le sommet des mégalithes verticaux à travers les linteaux horizontaux (en réalité, les tenons ne sont que partiellement engagés dans les linteaux). Les trilithons, les plus grands mégalithes à l’intérieur du cercle extérieur, apparaissent comme cinq paires indépendantes. Le relevé en montre quatre en place, alors qu’aujourd’hui seuls trois restent debout. Cette illustration offre donc un précieux témoignage sur l’état du monument en 1440.
Le dessin de Douai a été découvert récemment par Christian Heck, professeur d’histoire de l’art à l’université de Lille. Il vient de le publier dans un recueil d’articles scientifiques, Tributes in Honor of James H. Marrow, édité chez Harvey Miller/Brepols (Turnhout, Belgique).
La Scala Mundi de Douai, sous la même reliure que deux autres manuscrits historiques, est de la main d’un copiste anglais anonyme, qui semble aussi l’auteur des illustrations qui l’accompagnent. Christian Heck indique que le manuscrit a probablement été apporté en France par un catholique anglais fuyant la Réforme. Le manuscrit de Douai sera exposé à la Société des antiquaires de la Royal Academy, à Londres, en septembre 2007.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°249 du 15 décembre 2006, avec le titre suivant : Stonehenge en 1440

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