René Char

Des mots et des images

Le Journal des Arts

Le 30 juillet 2007 - 469 mots

À l’occasion du centième anniversaire de la naissance du poète, la Bibliothèque nationale de France offre un fascinant parcours biographique.

 PARIS - En hommage à René Char (1907-1988), la Bibliothèque nationale de France présente pour la première fois la diversité de son œuvre (poésie versifiée, prose et textes dialogués) dans une perspective biographique. Loin de mythifier Char, l’exposition lève en partie le voile sur un personnage complexe, conscient de sa postérité. « Un poète doit laisser des traces de son passage, disait-il, non des preuves. Seules les traces font rêver ». Prêtés par la Bibliothèque littéraire Jacques-Doucet et des collectionneurs privés, ses correspondances, manuscrits et photographies constituent les seules empreintes qu’il nous a transmises. Véritables palimpsestes, ses poèmes sont présentés depuis les notes griffonnées sur un carnet jusqu’aux éditions annotées par l’auteur. Rythmé par des enregistrements sonores et des films, le parcours de l’exposition déroule chronologiquement toute l’œuvre et la vie du poète.
Char écrit ses premiers vers sous le soleil provençal, à L’Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse), où il passe toute son enfance. Loin de sa mère qu’il déteste, il trouve refuge chez les demoiselles Roze, des parentes, où il découvre la poésie de Rimbaud. Au début des années 1930, ce révolté rejoint les surréalistes, comme l’atteste son abondante correspondance avec Paul Éluard et André Breton. C’est avec eux qu’il publie un texte à trois mains : Ralentir travaux. Sa poésie est abrupte, épurée, jusqu’à réduire ses phrases à de fulgurants instantanés.

« Résistance n’est qu’espérance »
Quelques années plus tard, Char pose sa plume pour prendre les armes et ouvre un nouveau chapitre de son histoire : la Résistance. Devenu « le capitaine Alexandre », chef départemental des Forces françaises combattantes, il interrompt sa carrière poétique pour la reprendre à la Libération avec les recueils Seuls demeurent et Feuillets d’Hypnos. Fasciné par le langage pictural, il aspire à faire dialoguer les mots avec les images et sollicite ses « alliés substantiels », les peintres Picasso, Dalí, Brauner, Miró ou Braque. Leurs illustrations deviennent indispensables à l’existence même du poème. Mais Char compose aussi avec les toiles de ses amis, telle l’étonnante Chaise de Braque, qui donne naissance à Sous la verrière. Destinée à Yvonne Zervos, sa plus fidèle compagne, la précieuse collection de manuscrits enluminés clôture le parcours, offrant l’une des plus belles noces entre l’art et la poésie.
Cette exposition témoigne d’une création prolixe, fruit des échanges entre l’auteur et ses amis artistes. Proche du poète, Nicolas de Staël le dépeint comme un « homme […] fait de dynamite dont les explosions seraient hâlées de douceur calme ». Loin de gommer cette contradiction, la présente manifestation révèle toutes les obscurités du tempérament de Char, conjuguant « Fureur et mystère ».

RENÉ CHAR

Jusqu’au 29 juillet, Bibliothèque nationale de France, Quai François-Mauriac, 75013 Paris, tél. 01 53 79 59 59, www.bnf.fr, tlj 10h-19h, sauf lundi, jours fériés, et dimanche 13h-19h. Catalogue coédition BnF/Gallimard, 264 p., ISBN 978-2-07-011888-5

RENÉ CHAR

- Commissaire de l’exposition : Antoine Coron, directeur de la Réserve des livres rares de la BNF. - Nombre de pièces : 400

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°260 du 25 mai 2007, avec le titre suivant : Des mots et des images

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