XVIIIe siècle

Le souci du détail

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 27 juillet 2007 - 563 mots

Immortalisant les Loges de Raphaël ou le décor du palais Farnèse, les planches du graveur italien Giovanni Volpato sont présentées au public pour la première fois.

 TOURS - Chefs-d’œuvre absolus associant l’architecture, la peinture et la sculpture selon une admirable harmonie et une parfaite rigueur, les Loges de Raphaël au Vatican influencèrent nombre d’artistes pendant des siècles. Ainsi, Giovanni Volpato (lire l’encadré) exécuta à Rome à partir de 1772 une série de gravures immortalisant l’œuvre dans ses moindres détails, depuis les guirlandes de fleurs et fruits peints à fresque sur les lunettes du mur intérieur, jusqu’aux paysages se profilant à horizon. Le Musée des beaux-arts de Tours expose aujourd’hui, pour la première fois, la totalité de ce délicat ensemble, soit 43 planches, provenant de ses propres collections, mais aussi de l’École nationale supérieure des arts décoratifs, à Paris. Présentées selon un accrochage symétrique, évoquant l’étage central du palais pontifical réalisé par Raphaël en 1519, les planches témoignent du savoir-faire de Volpato qui prenait soin à les rehausser de couleurs et de feuilles d’or. On retrouve délicatement reproduits les anges et victoires installés au centre de chaque voûte, les encadrements en stuc doré, les éléments illusionnistes en caissons, les murs en trompe-l’œil, les animaux et monstres peints en camaïeu, les grotesques déployés sur les pilastres ou encore les scènes de l’Ancien Testament et les épisodes de la vie du Christ ornant les voûtes. Destinées aux grands princes européens de la fin du Siècle des Lumières, les planches de Volpato furent rendues célèbres par Catherine II de Russie qui, après les avoir vues, fit réaliser une copie à l’identique de cette galerie dans son Palais de Saint-Pétersbourg. À cette époque, le répertoire de Raphaël eut un retentissement considérable dans toute l’Europe, en Allemagne, en France ou en Suède. Ses arabesques et grotesques furent utilisées comme motifs pour des décors intérieurs, des textiles ou des papiers peints. Les dessinateurs des manufactures françaises s’inspiraient largement des planches des Loges de Volpato, en donnant une place prépondérante aux éléments floraux.
Autre série exécutée par Volpato, les eaux-fortes consacrées à la Galerie du Palais Farnèse influencèrent, elles aussi, les arts décoratifs français de la fin du XVIIIe siècle. Créé en 1598 par Annibal Carrache, ce décor, considéré comme une de ses plus belles réalisations, devint un modèle largement copié par les artistes ; Volpato ne dérogea pas à la règle. D’un grand intérêt pour les historiens d’art, ses estampes offrent la dernière représentation de la galerie telle que l’avaient conçue Carrache et le cardinal Odoardo Farnèse : avec des Antiques (parties pour Naples en 1787) permettant une confrontation entre peinture et sculpture, art moderne et art antique. Au-delà de leurs prouesses techniques, les planches de Volpato, à la lisière de la gravure et du dessin, sont aujourd’hui encore des témoignages précieux.

Volpato, l’enfant de Bassano

Probablement né en 1735 à Bassano del Grappa, Giovanni Volpato se forme au métier de graveur à partir de 1759 dans l’atelier de Giambattista Remondini, puis auprès de Francesco Bartolozzi qu’il rejoint à Venise, centre exceptionnel de production d’estampes. Sollicité pour graver les voûtes et les pilastres des Loges du palais du Vatican en 1771, il déménage son atelier à Rome où il publie deux séries prestigieuses consacrées au palais Farnèse et aux Chambres de Raphaël. Ses gravures des décors des Loges de Raphaël, exécutées de 1775 à 1777, connurent un grand succès dans toute l’Europe.

GIOVANNI VOLPATO – LES LOGES DE RAPHAËL ET LA GALERIE DU PALAIS FARNÈSE

Jusqu’au 30 avril, Musée des beaux-arts, Palais des Archevêques, 18, place François-Sicard, 37000 Tours, tél. 02 47 05 68 73, tlj sauf mardi 9h-12h45 et 14h-18h. Catalogue, éditions Silvana Editoriale, 264 pages. - Commissariat : Anne Gilet, conservateur ; Philippe Le Leyzour, conservateur en chef - Nombre d’œuvres : 60 - Scénographie : A.U.M., Paris

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°252 du 2 février 2007, avec le titre suivant : Le souci du détail

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